Les amis de Prague
On m’a dit
le temps vole
Il y a là-bas au sommet de la route
cette ville
qui bat
Il y a près de ce cœur
des amis qui dorment
et qui s’éveillent
quand les grandes cloches
tonnent
Je vous ai reconnus
parce que vous teniez
un chant dans la main droite
et dans la main gauche
un miroir pour y enfermer le soleil
Vous gardiez sous vos paupières
des yeux qui brillaient
comme des couteaux
et j’ai lu dans vos gestes
tous les messages
du pays que nous avions parcouru
ensemble
autrefois
aujourd’hui
Je ne sais pas oublier
le goût doux du café crème
et le son bleu comme l’alcool
de toutes vos voix
Vous êtes là
trois quatre cinq six sept
vous êtes toute une armée
et vous êtes tout seul
devant vous-même
avec le courage des jours de pluie
et de la neige des saisons
Il faut encore me tendre la main
de temps en temps
quand vous regardez
une grande maison toute neuve
quand vous écoutez le vent
qui dit ami
Il faut quelquefois
oublier
mais pas trop
votre ami
Maintenant
dans le cercle des jours
je ne cherche pas seulement à revoir
la petite rue de l’or
ou les vitraux de la cathédrale de St. Vit
ou encore le cimetière juif
et l’horloge du souvenir
Maintenant
je vois vos mains
qui sont plus grandes que moi
et qui tournent
comme les hélices
Je sais que je ne peux oublier
la grande musique
qui se nourrit des reflets
du fleuve cygne
et qui bondit hors la ville
autour des grandes collines
c’est le rendez-vous des amis
le rendez-vous des tramways lents et rouges
et le chant multicolore
de tout l’amitié triomphante